mercredi 4 avril 2007

J’EMMERDE SALAZAR...


Mes potes me demandent souvent pourquoi suis-je tellement attaché à ma France et si peu au Portugal de mes parents ? Si peu que j’en suis venu, lors du match de demi-finale de la coupe du monde, France-Portugal, à affubler les footballeurs portugais de toutes ces insultes delicates, à caractère homophobe, que seul la vertu cathartique du Football autorise.

Je leurs réponds en general, du haut de ma sublime mauvaise foi, que si la « Seleçao » portugaise était composée à majorité de joueurs galiciens ou bien du FC Porto, à la limite mon cœur balancerait un peu mais comme ce n’est jamais le cas, je conspue sans le moindre état d’âme.
Puis, je leur explique, du haut de ma puissance analytique que j’ai résolu ma problématique identitaire, celle propre à chaque fils d’immigrés, de la façon suivante :

Considérant que Le Portugal n’a rien fait d’autre, pour moi, que de foutre mes parents sur les routes ; que le pays qui nous a donné les moyens de nous construire un avenir, a été la France ; et pour bien d’autres raisons que je vous épargnerai cette fois-ci ; j’ai décidé que je ne me reconnaissais pas comme appartenant à la Nation portugaise ;

Considérant toutefois, que je suis quand même très attaché à mon magnifique village « minhoto » (le Minho étant l’un des département du Nord du Portugal) ; à la terre de mes ancêtres ; à sa culture ; à ses gens ; à cette langue que je vis comme une fenêtre sur le monde et plus particulièrement sur un Brésil dont je kiffe la race métissée ; que je suis donc attaché à ma région d’origine ; région, au passage, que le gouvernement central désigne par l’appellation « Nord » pour mieux nous faire oublier qu’il s’agit de la « Galice Bracare» à l’identité autre que simplement nordiste ; j’ai décidé que je n’avais qu’à faire comme tout français antillais, tout français corse ou autre. Rester attaché à ma région mais ne faire allégeance qu’à la France, ma seule Patrie, celle où s’inscrit mon destin...Dieu que c’est beau tout ce Matriotisme...Vous pouvez m’applaudir et signer en bas de ce billet le formulaire de parrainage me permettant de recevoir la Légion d’Honneur.

Pourquoi vous raconte-je tout cela?
1- Pour faire mon intéressant tout en éclairant sur toutes ces questions, les psys, sociologues, historiens, géographes, touristes et autres petits curieux ;
2- Pour faire pleurer margot sur mon sort de pauvre gosse d’immigrés. Ça c’est pour mon coté Fado ;
3- Parce qu’alors que je n’attendais plus rien de ces sardines à l’huile celtibériques, mes gênes portugaliciens vibrèrent d’une fierté soudaine lors de la victoire du Oui au referendum sur le droit à l’avortement et quand j’appris que je n’étais pas le seul fils de Manuel à aimer le Rugby bien plus que ce sport de manchots qu’est le football. Le Portugal s’est en effet qualifié pour les phases finales de la coupe du monde de Rugby qui se jouera cette année en France. Youpich !

Mais voila qu’à peine mes gênes vibrèrent, que l’instant d’après ils se planquèrent bien au fond de mon bulbe pileux. Le 25 mars dernier, un concours télévisuel portugais censé élire le plus grand Portugais de l'Histoire a vu triompher l'ancien dictateur Antonio de Oliveira Salazar (1899-1970). Fichtre me dis-je ! « Caralho » me dis-je ! Ce qu’ils peuvent être cons tous ces Chinchards à Pento™ [PUB], me dis-je !

Puis me vint à l’esprit l’une de mes descentes estivales au bled, en bus, du temps où j’étais étudiant et où pour avoir claqué ma tune dans toutes les niaiseries propres aux jeunes, il ne me restait plus comme mode de locomotion abordable, que les 24 heures d’un voyage en car depuis la porte de Charenton jusqu'à Viana do Castelo. Je vous épargnerai, également cette fois-ci, les bruits et les odeurs propres à tout pécore en voyage, autre que corrézien. Par contre je m’en vais vous raconter comment j’ai fais cette fois-là, pour me faire apprécier de tous ces bouseux de diligence.

Alors qu’un groupe de vieilles merluches se plaignait de la perte des valeurs traditionnelles dans notre bonne vieille France comme dans leur Bled pourri, il se trouva un merlu pour appuyer cette longue litanie ( 10 heures de suite, montre en main) de son regard de merlan frit et de cette phrase devenue un classique chez tous les portugaulois. « C’était quand même mieux du temps de Salazar. Au moins il y avait Le Respect ! ».

Je ne sais pas ce qui m’a pris. Le bruit et l’odeur, de ces corréziens du sud, sans doute. Le fait est que ne pouvant plus me contenir, je lançais à ce banc de poiscailles avariées, un bon gros dégazage verbal comme j’en avais déjà le secret. « Dites-moi les tanches, si le temps de Salazar était vraiment si génial que ça, pourriez-vous m’expliquer pourquoi avez-vous ressenti le besoin d’émigrer en masse ? » je ne sais pas pourquoi mais le reste du voyage se déroula dans un silence propre aux grands fonds marins. Ce fut reposant.

Vous comprendrez mieux maintenant pourquoi aujourd’hui je suis un extrême démocrate prêt à pourfendre tout nostalgique de Vichy comme du Docteur Salazar pour lequel le Maréchal nourrissait une grande estime et admiration.

Aussi, après ce qu’elles viennent de me faire, histoire de remettre une couche de sel sur toutes ces morues moisies depuis la tête jusqu’à l’arrête, qu’on me laisse leur chanter le petit couplet que mon grand-père, pétri d’aspirations démocrates et déjà socialiste, chantonnait à ses copains au retour des « Romarias ». Des sortes de Férias aux accents plus religieux que festifs. Un couplet qui aurait pu me valoir de ne jamais voir le jour si d’aventure quelqu’un l’avait balancé à la police politique. Mais c’est aussi cela qui me pousse à m’attacher au sang hérité de ce coté-là. Mais trêve de « Saudade ». Voici le couplet en question :

« Como Jesus foi filho da virgem Maria,
Salazar foi filho tambem, um filho da puta…”

“De la même façon que Jésus était le fils de la Vierge, Salazar é un fils, un fils de …”

Quant à ceux qui seraient tentés par la version borgne d’un salazarisme à la française, qu’ils me laissent leur en résumé le bilan : Une société autoritaire, répressive, rétrograde, pauvre et colonialiste...Que du bonheur !

Sinon, pour le titre du billet, il ne s’agit pas d’une simple facilité de langage mais d’un hommage, rendu à un passage mythique de l’un des monuments du 7e art. « Pearl Arbor ». Non pas au passage où Ben Affleck repousse avec son pote, chemise hawaïenne au vent, aux commandes d’un avion décapotable, la 2e vague d’avions japonais mais celui où l’acteur, connu comme le Joey de la série friends, qui joue également dans ce film le rôle d’un acteur raté, tourne la scène suivante. Alors qu’il savoure un café cannelle à la terrasse d’une brasserie lisboette, v’la t’y pas que subrepticement son amoureuse se fait dézinguer par une rafale de mitrailleuse provenant d’une voiture de la PIDE, la police politique. Tordu de douleur, il hurle alors sa rage comme son opposition au régime salazariste avec ce sublime « J’emmerde Salazar... » Et ben, moi aussi !

Docteur SILazar

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