mercredi 25 mars 2009

LES ACTIFS TOXIQUES DES SOCIÉTÉS EN GÉNÉRAL


Je suis profondément déçu par le grand patronat français, mais alors déçu à un point difficilement descriptible. Moi qui croyais que certains grand patrons étaient au moins malins, avaient le sens du jeu collectif, ben non, même pas. À l’évidence, ils sont juste cons à manger du foin, que dis-je, à s’en gaver.

Mercredi 18 mars, à la veille du mouvement de grève national, les dirigeants de la Société Générale annoncent très officiellement que le conseil d’administration de la banque avait voté, le 9 mars dernier, l’attribution de 5 millions d’euros en stock-options, à son président Daniel Bouton, à son directeur général et à des directeurs délégués. Une façon de récompenser des incapables qui n’ont même pas été fichus d’assumer leurs responsabilités dans le méga scandale « Kerviel », cette perte faramineuse de 5 milliards d’euros.

Dés le jeudi c’est la levée de boucliers quasi générale. Les Syndicats bien échauffés après le défilé du jour montent au créneau, que ce soit Bernard Thibault dénonçant « l’iniquité » d’un tel comportement ou une intersyndicale de la banque en question menaçant d’une « riposte du personnel si la direction devait maintenir sa décision ». Le gouvernement, Président en tête, trouve quant à lui tout cela « scandaleux » et exige « la renonciation à l’attribution de ces stocks-options ». Les coups de boucliers sur la nuque ayant quelque peu ramolli la coquille de ces crânes d’œufs bancaire, ceux-ci annoncent en plein week-end qu’ils renoncent à leurs stock-options.

« Sarkozycus invictus » me dis-je. Mieux qu’Obama, notre président est. Alors que mon Barackounet se fait envoyer par l’assureur AIG sur les choux bio plantés dans les jardins de la Maison Blanche par sa Michelle d’épouse, le président Sarkozy réussit, lui, à faire plier le grand capital français, empêchant ainsi la distribution de bonus totalement indus, sous forme d’actions ou autres.

Que tout cela tombe à point nommé, en plein mouvement social ; que tout cela est malin ; qu’il est gentil à nos banquiers d’offrir un aussi beau rôle à notre président.

Et bien je me suis fourré le doigt dans l’œil. Pour être capables de tels renvois d’ascenseur, de jouer un rôle conscient dans le plan communication de notre gouvernement, il faudrait qu’ils sachent jouer collectif, qu’ils aient le sens de « l’intérêt général » comme le dit Christine Lagarde. Ce que je ne crois plus lorsqu’on voit comment ils se sont accrochés tels des morpions pendant quatre jours à leurs stock-options et surtout comment certains de leurs petits camarades continuent de le faire.

C’est le cas de Thierry Morin, le PDG du sous-traitant automobile Valeo, qui n’aurait en aucun cas l’intention de renoncer à un parachute doré de 3.2 millions d’euros, alors qu’il envoie 1600 salariés au chômage et laisse cette société dans une difficulté telle qu’elle nécessite l’injection de 19 millions d’euros par l’Etat via le Fond Stratégique d’Investissement. S’il pouvait s’écraser avec son parachute, ce bon à rien, ça me ferait bien plaisir.

C’est aussi le cas des cadres de Cheuvreux, une filiale de courtage du Crédit Agricole, qui s'apprêtent à recevoir quelque 51 millions d'euros de bonus, alors même que le groupe Crédit Agricole a reçu 3 milliards d'euros de l'Etat et que 75 emplois vont être supprimés.

À l’évidence, ils s’en foutent de l’intérêt général. Ils osent tout. Comme le disait Audiard, c’est à ça qu’on reconnaît les cons. Ces actifs non contents d’aggraver des passifs manifestent comme une furieuse envie d’intoxiquer tout le système. Qu’attend-on pour les désactiver ?!?

Du coup Florence Parisot a beau nous expliquer que « le Medef ne se reconnaît pas dans le comportement d’un dirigeant qui piétine ainsi l’intérêt général de son entreprise », tenter de nous refourguer son « code de gouvernance » ou encore nous parler « d’éthique », même en faisant preuve de bonne volonté, quand je les écoute parler d’éthique, j’entends surtout « et toc ! ».

« Éthique », « morale », ils n’ont que ces mots là à la bouche, à commencer par notre Président. À tel point qu’il me donne l’impression que ce pays a élu un pape et non un chef de l’Etat. Tiens, après avoir cité Jaurès, il devrait essayer le Christ. « Il est plus facile à un 4X4 de passer par le trou d’une aiguille qu’à un détenteur de stocks-options de rentrer dans le royaume des cieux ».

La morale, on sait bien comment elle fonctionne dans notre pays catholaïque ; une petite confession, deux trois pater noster et ça repart. Et puis comment voulez-vous que je ne me bidonne pas lorsque je l’entends parler de « moraliser le capitalisme » alors qu’il a parachuté un secrétaire général adjoint de l’Elysée à la tête du groupe Caisse d’Épargne-Banque populaire. Est-il prévu de lui attribuer des stocks option, à notre bon monsieur Pérol ou pas ? Mouaif, faites ce que je dis et pas ce que je fais. Du toc ! Éthique et toc !

Mais surtout rappelons à notre président qu’en effet, les Français n’ont pas élu un pape. En république la morale ne se traduit pas par des prêches ou la menace d’excommunication, mais par des lois. Chose dont il semble commencer à se rendre compte puisqu’un décret serait en cours de préparation. Celui-ci fixerait « les conditions dans lesquelles est interdite l'allocation de stock-options ou d'autres avantages et bonus lorsque des entreprises bénéficient du soutien de l’Etat ».

Peut mieux faire mais pas mal quand même. Perso je m’attendais à pire. Avec le débat sur la rémunération des patrons qui patauge dans le populisme de tous bords, je craignais que l’on se défoule un coup en cherchant à plafonner toutes les rémunérations patronales. Crainte qui si elle ne parait pas, de prime abord, trop de Gauche, n’en reste pas moins rationnelle, à l’inverse du climat ambiant. Expliquons nous.

Pour commencer, je trouve toujours particulièrement flippant de voir des gens exiger de la part d’un président de droite des mesures dites de gauche, voir très, très à gauche. Portenawak !

Ensuite, au nom de quoi, nous autres citoyens à travers nos députés, nous arrogerions-nous le droit de plafonner les rémunérations dans des entreprises privées. Franchement de quoi je me mêle. Lorsque nous sommes Le Patron, comme dans le cas des entreprises publiques ou dans celles qui reçoivent des aides de l’Etat (l’Etat c’est nous), je le conçois. Je serais même en droit d’exiger la démission de tous ces tocards ou de leur proposer en guise de reclassement un petit poste de manager à Bucarest, Bamako ou Rangoon. Par contre quand le patron s’appelle l’investisseur, je ne vois pas ce qui nous autoriserait à gérer à leur place, à leur signifier qui ils doivent virer sans ménagement et qui il doivent cajoler de façon outrancière. N’est-ce pas leur problème ? Bon, si à la suite de leurs choix stupides, les autres salariés s’énervent un peu dans les locaux ou dans les urnes, il faudra aussi qu’ils en acceptent le prix. Au fait, c’est moi où il y a des élections qui approchent ? Les Européennes, c’est ça, avec une extrême-gauche qui espère tirer de larges bénéfices électoraux de tout cela. C’est bien ça !

Pour revenir à nos affaires, je suis catégorique, la seule chose qui regarde les citoyens, en terme de rémunérations privées, c’est le taux imposition, celui que l’on choisit d’appliquer aux différents montants des rémunérations. Or force est de constater également que les Français ont voté pour un candidat qui proposait un bouclier fiscal aux plus hauts revenus. Et même s’il serait logique qu’il suspende cette mesure pendant un an ou deux, au nom de la solidarité nationale, les plus riches étant bien contents par ailleurs que le contribuable de base leur sauve le cul (en matière d’investissements voire de places au sein des sociétés aidées) par la garantie de l’Etat, je ne vois pas, là aussi, ce qui me permettrait d’exiger du président ou du gouvernement qu’ils trahissent en quelque sorte le vote de mes très chers concitoyens. Et oui, un vote ça s’assume…

Et puis, moi, décidemment, comme je l’ai déjà dis à plusieurs reprises, je suis tout sauf favorable au nivellement pas le bas. Non, délire pour délire, je préfère l’inverse. Puisque des patrons ou des cadres dirigeants refusent de s’appliquer les mêmes règles qui régissent les autres salariés, appliquons à tous les salariés les règles dont bénéficient ces patrons de grands groupes. Oui de grands groupes seulement car quand les petits patrons comme moi se viandent, ils en payent le prix, eux, par la faillite ou la ruine. Vous ne voyez pas où je veux en venir. Attendez, vous allez adorer.

En fait, je demande à ce que les députés inscrivent dans le Code du Travail la chose suivante. Dorénavant tout salarié d’une grande entreprise qui commettra une faute grave ou lourde, partira non pas comme aujourd’hui sans indemnités ni préavis, mais avec deux ans de salaires en guise de golden parachute, une petite retraite-chapeau ou tout autre bonus laissé à la libre appréciation de mes représentants. De quoi améliorer considérablement l’esprit d’entreprise, la responsabilité et le goût de l’excellence, non ?

Une idée que je soumets aux députés de droite, étant donné que ma gauche est au abonnés absents.

« Que fait ma Gauche ? » Elle bulle, elle spécule, au plus mauvais moment. Elle se voit au Zénith avec un spectacle paranoïaque, un sketch à la Bigard, nous expliquant que le président Sarkozy serait aussi dangereux pour les libertés publiques qu’une chauve-souris. Pas étonnant que nos socialistes fassent un bide et que Ségolène, la reine du stand-up, se marre de façon austère. C’est sûr, la peur des chauves-souris c’est vraiment la priorité numéro 1 des Français. Non mais quel ramassis d’ahuris ceux-là aussi !

SILalutte finale…

Celle d’un petit patronat qui à ce rythme va finir par souhaiter arranger la façade du grand.

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