mercredi 5 mai 2010

Le premier anniversaire de ma première sciatique (parce que nous sommes bien peu de chose)


Une sciatique, ce n’est pas drôle

Me voilà possédant au moins un point commun avec notre bon Premier ministre, François Fillon, pour ceux qui auraient oublié son nom. Non, plutôt deux points communs. Un certain goût pour les jolies Gaëliques en même temps qu’un dégoût de la sciatique. Plus précisément, deux en un, une lombosciatalgie. Un mot qui rapporte un max de points au scrabble ainsi qu’au corps médical étant donné que le plein-le-dos serait le mal du siècle. Un mal qui toucherait surtout les grands de ce monde et ce depuis toujours. Par exemple, Jésus, fils de Dieu ou pas, en souffrait déjà, et ce malgré une vie assez oisive. Pour preuve, prière de se référer aux stations 3, 5, 7 et 9 de son chemin de croix. Les responsabilités. Le poids du monde. Un club que j’ai intégré la semaine dernière. Une expérience assez intéressante qui m’a fait voir mon corps sous un autre angle ou plutôt sous une absence d’angle, tout angle, droit de surcroît, étant impossible à atteindre dans ce genre de cas.

Une expérience qui m’a surtout permis de comprendre pourquoi les gens qui vivent une sciatique évitent de trop en parler, se contentant souvent d’un « faut le vivre ». Ou bien pourquoi personne n’a encore songé à en faire un sketch genre « sciatique is fantastic ». Je comprends mieux, c’est sûr. C’est que certains détails sont carrément gênants. Un exemple. Impossible de déféquer avec une sciatique. C’est chiant ! Désolé pour le détail mais ça a son importance tout de même, surtout quand on n’y arrive pas. Je vous assure. Mais reprenons depuis le début.

Après m’être couché le lundi soir avec comme une appréhension du lendemain, voilà t’y pas que je me réveille le mardi avec une drôle d’impression. Celle de ne pas pouvoir me lever. Non pas l’expression d’une quelconque mauvaise volonté. Non, juste comme une impossibilité. Depuis les doigts de pied jusqu’aux traits du visage, il y avait tout qui était tiré. Tiré, c’est le mot. Après moult efforts, j’arrive à me dresser. Plus ou moins debout, je constate que je n’arrive pas à poser le pied droit. La jambe reste pour partie contractée, un peu comme s’il manquait quelques centimètres de câble à celle-ci, ou qu’une partie du câble se trouvait emberlificoté au-dessus des reins. Une bien drôle d’impression, c’est certain.

Me voyant ainsi ma femme appelle le médecin de famille dont je refuse de connaître le numéro à cause de cette fierté pécore qui me pousse au refus de toute maladie. Dignité toujours, je décide d’aller me planquer dans les toilettes où je pourrais grimacer ma douleur à l’abri des regards. Une drôle d’aventure qui s’est conclue par un échec. Je vous épargne le chemin de croix pour y parvenir avec ma jambe contractée, vous signalant juste que si j’avais pensé un jour en chier autant pour m'asseoir sur le trône, j’aurais installé plus tôt des poignées de chaque côté des latrines, à l’image de celles que l’on trouve dans les hôpitaux. L’utilité d’un tel équipement m’est enfin apparue évidente. L’échec s’est traduit quant à lui par l’impossibilité d’exécuter la tache dont je vous parlais dans le second paragraphe. Tout bonnement humiliant ! Toutefois sachant rester positif en toute occasion, je me suis relevé en me disant que j’avais enfin compris le sens aussi bien figuré que littéral de l’expression « se retrouver coincé comme une merde ».

Sur ces entrefaites notre bon docteur arrive. Après les salutations d’usage et les premières explications, profitant du fait que je sois debout, il me demande de me baisser pour voir. Ce fut vite vu. J’ai baissé le menton. J’étais déjà à bloc. « Ah quand même », me dit-il. Il me tapote alors les genoux avec son marteau. « Pas de réflexes ». Puis pianote sur mes cuisses en me demandant si je sens le bout de ses doigts. « Oui, quand même » que je lui réponds. « Je n’en suis pas encore au même stade que Christopher Reeves suite à un abus manifeste de kryptonite ». « Bon ben, c’est un beau lumbago », conclue-t-il avant de commencer à établir son ordonnance.

« Je serai sur pied demain docteur », que je lui demande, « c’est que le mercredi, j’ai piscine ». Me regardant, il répond « mais oui ». Ouf ! Me dis-je. « Mais non voyons ! Là c’est trois jours minimum de repos, avec anti-inflammatoires, antidouleurs et un sédatif pour dormir et pas de natation, pas demain en tout cas. Demain, vous tacherez plutôt de me faire un radio ». Merde, j’y avais cru.

Me voila allongé dans mon lit comme un vieil étron sans pouvoir faire quoi que ce soit et avec mon iPod pour seule compagnie. Ça m’apprendra à jouer les Rocky IV, les plaquistes, à ranger pour mes femelles tous leurs cartons de vêtements d’hiver, à bécher le jardin et à passer mes nuits à écrire au lieu de dormir. Et oui, j’ai passé une partie de la journée à m’insulter. Pour tout dire, j’espérais me transformer en Hulk et me guérir tel le docteur Banner dans l’un des épisodes de la vieille série télévisée. Suite à un accident, il s’était retrouvé paralysé des membres inférieurs. Après un moment d’abattement, n’en pouvant plus, il est rentré dans une vive colère. Colère qui lui fit le plus grand bien puisque sa transformation en Hulk allait le guérir. Ce ne fut pas mon cas. Ça m’a empêché de me détendre.

Le lendemain, j’allais tout de même suffisamment mieux pour pouvoir me rendre au cabinet de radiologie, ce qui ne manqua pas d’un certain caractère épique, là aussi, surtout l’épisode « montée et descente de voiture ». Au passage, le radiologue ne manqua pas de me servir un peu d’humour médical. « À l’évidence, c’est bien bloqué là ». « Je confirme » que je lui ai dit.

Suffisamment mieux après la séance radio pour pouvoir me mettre sur le flanc et tapoter sur mon ordinateur.

Suffisamment mieux surtout pour pouvoir remporter l’une des plus belles victoires sur moi-même. Réussir à chier. Un pur moment de bonheur mais pas seulement. D’un point de vue scientifique, j’ai pu me rendre compte à quel point l’extrémité du côlon ainsi que le rectum étaient proches de la colonne vertébrale. J’ai même pu compter les vertèbres au fur et à mesure que je sculptais ma nature morte. Une expérience pleine d’enseignements que je ne tiens pas à renouveler. Mercredi, je retourne à la piscine, histoire que mon dos se remette d’aplomb.

En conclusion, il faudra quand même, un jour, que je dise deux trois mots à la ou les divinités qui ont conçu notre enveloppe charnelle. Afin de tuer mon ennui lors de ma première journée d’alitement, j’ai procédé à un audit assez exhaustif des dysfonctionnements et autres manifestes défauts de conception présents chez les hominidés et dont je souhaiterais leur toucher deux trois mots. On en reparlera…

SILombalgique

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