mercredi 9 mai 2007

MINORITY REPORT


D’un côté, des scientifiques en mal « d’illusions de contrôle », de pouvoirs magiques scientistes, qui espèrent réussir à déjouer des complots terroristes en scannant nos pensées, selon le principe énoncé par le professeur John-Dylan Haynes, chercheur en sciences de la cognition et du cerveau au Max Planck Institut, et voulant que « chaque pensée et donc chaque intention est associée à un schéma unique d’activité du cerveau ». « Ainsi le projet d’une attaque terroriste doit correspondre à un schéma particulier ». Et « Si on est capable de le reconnaître, on doit pouvoir prédire que quelqu’un fomente un tel complot », nous dit toujours le professeur Haynes. Bah, tiens!

De l’autre coté, tous les paranos que nous sommes qui s’inquiètent du fait que des scientifiques puissent scanner, numériser nos pensées, tout ça parce qu’elles sont très souvent inavouables. La belle affaire ! Et alors ?

Rassurez-vous, moi aussi , il m’en passe par la tête, des tonnes de saloperies que la morale ou la loi réprouve. Aussi mon aire de Broca, tapie dans ma région frontale inférieure, m’adresse jusqu’à l’amygdale modératrice, au moins deux, trois envies de génocide quotidiennes. Mon hypothalamus, lui, face aux stimuli permanents des rues parisiennes, m’éjacule jusqu’au sommet du neo-cortex des dizaines d’envies d’accouplement par jour. Sans oublier, tout en ne sachant pas très bien d’où cela me vient, l’envie fréquente d’escalader l’échelle sociale en m’essuyant les pieds sur la tête de mes congénères. La belle affaire ! Et alors ? même pas peur !

Et oui, j’ai fini par accepter que dans mon crâne, la reptilité, soit mon inhumanité, côtoie mon humanité, l’horrible côtoie le merveilleux, le primitif l’évolué, la barbarie le civilisé.

Et tant que je m’évertuerai péniblement à coucher de l’avouable sur le papier comme sur les pages de ma vie, je peux bien penser ce que je veux, comploter, fantasmer, délirer, déconner…
Nos boîtes crâniennes se devant de rester à jamais le territoire de toutes les libertés, de tous les impossibles ; un territoire à l’abri de toutes les inquisitions possibles. Car si je conçois que l’on puisse pécher en actes, paroles ou omissions, ça fait bien longtemps que je refuse de confesser l’intégralité de mes pensées.

Cela dit, si ça peut faire avancer la science, vous pourrez toujours me faire passer le cerveau reptilien au scanner. Je suis assez doué pour y mettre en scène des horreurs en technicolor. Bande de petits voyeurs…

Docteur SIL

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