mercredi 13 mai 2009

HADOPRIS QUI CROYAIT PRENDRE


C’est marrant comment lorsque quelqu’un se casse la figure devant nous, un rire quasi-irrépressible se déclenche. D’où le succès d’émissions télé telles que « vidéo-gag ». Un réflexe que je n’ai jamais vraiment compris. En tout cas, question maladresse, un genre me fait particulièrement rire. Quand mes congénères et moi-même nous nous mordons la queue tel le serpent mythique Ouroboros. Ça fait mal, mais que c’est drôle.

« Quel peut bien être le rapport entre les morsures de queues et la loi Hadopi sur le piratage qui vient enfin d’être adoptée », me demanderez-vous. Vous allez comprendre et peut-être bien en rire.

N’est-il pas particulièrement drôle de voir, au moment où le gouvernement cherche à faire voter cette loi protégeant les droits d’auteur, que l’UMP se prend les pieds dans la bobine avec une triste histoire de piratage. En effet, suite à l’utilisation sans autorisation dans deux meetings et sur Internet de la chanson « kids » du groupe MGMT, voici que le parti du Président se retrouve à devoir payer 32 500 euros de dédommagements. Pas mal, non ? Comme quoi les questions de droit d’auteur, c’est compliqué. Ouarf ! Ouarf ! Ouarf !

Pas simple en effet, y compris pour l’opposition qui elle aussi s’est viandée en beauté. Après le désormais légendaire vote en catimini de nos panthères roses, ayant permis de saborder la loi lors de son premier passage, patatras ! Non seulement les socialistes se mettent les artistes à dos alors que la gauche est censée être l’amie des artistes et de la culture mais pire encore, ils se retrouvent à militer pour que les auteurs soient spoliés du juste revenu de leur travail. « Travailleuses, travailleurs culturels, la gauche vous spolie » pourrait crier la droite. Tout ça pour quoi ? Pour faire dans le populisme. Non pas cette définition étrange que j’ai entendue à gauche, comme quoi défendre les droits des artistes et de leurs majors serait démagogique, mais l’autre définition, la vraie. Rappelons que le populisme est le fait de caresser les bas instincts du peuple dans le sens du poil. Or nos instincts de pillage, de gratuité et de spoliation ont été ici particulièrement bien brossés par la gauche. Sacrés populares. Panem et circenses. Pouvoir d’achat et téléchargement gratuit. Poilant non ?

Mais ce n’est pas fini car la loi, elle aussi, se mord bien le pédoncule.

Au fond cette histoire de piratage, c’est quoi ? Ce n’est rien d’autre que des entrepôts numériques (sites et logiciels de piratage) grands ouverts et rendus accessibles par les voies électroniques mises à disposition par les fournisseurs d’accès. Or, d’un côté on vous permettrait de passer tous les jours devant ces entrepôts et de l’autre on voudrait que vous n’y fassiez pas un petit crochet ? Franchement c’est pas fendard comme raisonnement, ça, non ? Et ce alors que la solution est toute simple. Primo, cogner sur les concepteurs de ces sites, un peu comme pour ceux de « Pirate Bay » qui en Suède viennent de se faire condamner, afin que ces entrepôts ferment leurs portes. Deusio, exiger des fournisseurs d’accès, sous peine de fortes amendes, qu’ils ferment les rocades numériques qui permettent l’accès à ces entrepôts. Filtrer ces repères de voleurs en somme. Avouez quand même que ce sont là des solutions bien plus raisonnables et légitimes que celles proposées dans la loi Hadopi. À savoir, poster un e-flic (des spyware) derrière chaque internaute, au risque de tomber dans des délires orwelliens du genre surveiller nos courriels au cas où il nous viendrait l’idée d’adresser à tout notre carnet d’adresse des pièces jointes lourdes de 500 Mo (films, albums et autres). Portenawak !

Ben oui quoi, ce n’est pas parce que je prétends que nous sommes nos meilleurs ennemis en matière de flicage que je ne vais pas réagir lorsque ce sont mes représentants qui semblent céder à la tentation du mordillage caudal.

Enfin bon, je ne m’amuserai pas trop à jeter la pierre car j’ai moi aussi fait mon vilain Ouroboros. Avouons-le, même si je ne télécharge quasiment rien par respect du droit d’auteur, parce que j’ai autre chose à faire ou pour faire partie d’une génération attachée au support qu’il soit papier, CD, DVD, je n’ai pas toujours vu ce pillage généralisé d’un trop mauvais œil, puisque satisfait entre autres de voir le budget coke-pétasses des majors fondre comme neige au soleil. N’hésitant pas également à trouver le prix des CD bien trop élevé ; que les artistes ne vivent pas si mal que ça ; que lorsqu’on est habitué à voir ou à écouter des œuvres « gratuitement » (la pub ça se zappe) à la télé ou à la radio, ne pas pouvoir le faire sur Internet peut sembler bizarre ; et que par conséquent la solution de la licence globale semblait une idée pas trop mauvaise. Mais voila deux artistes m’ont mis le nez sur mon bout de queue.

Le fils Dutronc tout d’abord qui l’autre soir sur BFMTV expliquait aux très sympathiques présentateurs du journal de 20 heures, Thomas Sotto et Candice Mahout, que la licence globale fonctionnerait par sondage et que par conséquent ceux qui vendent déjà beaucoup et sont piratés à la même hauteur recevraient la plus grande part de ce gâteau redistributif. Alors que le petit artiste qui vend 2000 CD et qui en vendra encore moins avec le téléchargement, ne recevra rien par le biais de la licence globale étant donné qu’il sera invisible puisque noyé au milieu de l’océan de titres piratés. Que voulez-vous répondre à ça ?

S’agissant de l’argument du « prix des CD », Dave Gahan, le chanteur du groupe Depeche Mode, me l’a explosé en une seule phrase. « Les gens sont capables d’aller s’enfermer pendant une heure dans des coins glauques comme les McDo et autres Starbucks, en y dépensant le prix d’un CD, et ils trouvent que les CD sont trop chers ; vraiment n’importe quoi ! ». Et pan dans les dents du serpent !

Bon maintenant, si je me range complètement aux côtés des artistes, j’ai tout de même une petite requête à formuler. Fichez donc la paix, please, à Youtube et Dailymotion. C’est que c’est particulièrement bon de pouvoir y voir certains clips, vieux ou récents, et de pouvoir en faire de la pub sur nos Blogs. Par ailleurs on n’y trouve jamais des albums entiers à télécharger. Par conséquent ces échantillons ne peuvent que faire plus de pub aux artistes que de mal. En tout cas, c’est ainsi que j’ai eu envie d’acheter des albums ou des DVD dont je n’aurais jamais eu l’idée sinon. Maintenant, il est possible que là aussi, je me morde la pétiole ? À voir mais sur ce point, j’en doute…

SILegfried œil de serpent

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