mercredi 15 avril 2009

CACHEZ DONC CETTE RÉALITÉ QUE JE NE SAURAIS VOIR.


Certes le policier qui a mis en ligne la vidéo de l’agression du désormais célèbre Jean-Kevin dans un autobus a commis une faute. Il a enfreint sciemment la loi sur le secret de l’enquête, faute qui peu difficilement être ignorée. Cependant, force est quand même de reconnaître que son geste relève de l’acte de bravoure, de résistance, surtout quand on voit le niveau des réactions, le niveau de fange dans laquelle s’enfonce mon pays. J’ai honte, si vous saviez comme j’ai honte de ce mauvais film bien de chez nous. Une comédie dramatique où les acteurs principaux interprètent à merveille leur rôle, malheureusement.

Nos agresseurs tout d’abord. Fidèles à eux-mêmes, prévisibles à souhait. Courageux puisque jouant comme à leur habitude du cinq contre un. Ne se trompant pas de combat puisque sachant cibler parfaitement le plus haïssable des sapiens-sapiens, le « sale blanc » ici décliné sous la forme du « Français de merde ». Généreux de par leur capacité à distribuer des mains pleines de châtaignes et à répartir équitablement le bien d’autrui. Bref, un humanisme à fleur de peau qui ne manquera pas d’émouvoir nos bonnes âmes comme nos bons ânes, surtout ceux d’extrême-gauche pour qui un crâne rasé qui commet une ratonnade est un fasciste, mais pour qui un crâne-encapuchonné qui commet une françonnade est un camarade en lutte. Putain de malades !

La victime ensuite. Oui, je ne jouerai pas l’hypocrite. Elle aussi, elle me fait honte. Parfaite du début à la fin. « Une bonne tête de victime » comme on le dit dans nos cités. Ce qui explique pourquoi nos prédateurs s’en sont pris à lui. L’instinct. Ils ont dû sentir la proie facile. Il a beau faire une tête de plus que son agresseur principal, il ne fait pas un seul geste pour se défendre. Pas le moindre coup de rendu. La dignité sans doute. Sa seule réaction ayant été de tenter de récupérer son portefeuille. Beau réflexe ! Le pompon étant ses déclarations dans le Figaro. Un monument de noblesse. Ce jeune homme qui « veut passer à autre chose », n’a pas entendu les injures racistes dont il a été l’objet. Par contre en brillant esprit analytique qu’il est, il a pu se rendre compte que ses assaillants étaient ivres ou drogués, seule chose capable d’expliquer de tels propos car de toute façon, triste réalité ou pas, il se refuse à « passer pour l'incarnation d'une certaine image sociale qui aurait été prise à partie par des étrangers ». Il veut oublier le plus vite possible ce qui l’a le plus blessé, la diffusion des images sur internet. Trop dur de voir la réalité en face, n’est-ce pas ? Encore un lucide ! Encore un candidat pour jouer le Christ crucifié lors des sanglantes célébrations de Pâques aux Philippines. Dis-moi Jean-Kevin, si jamais des envies de gifles me venaient, je peux t’appeler ou pas ?

Au tour de son autoproclamé protecteur maintenant, le sémillant Olivier Duhamel, professeur de ce bon élève de science Po, qui nous expliquait hier dans sa chronique matinale sur France culture que son élève « suscite l’admiration » par « la leçon de déontologie journalistique qu’il donne dans son interview ». Dieux que c’est beau la dignité bobo ! N’hésitez surtout pas à vous faire raccompagner en Noctambus par Olivier Duhamel. Même s’il ne lèvera pas le petit doigt pour vous éviter de vous faire défoncer la gueule, il saura trouver les mots qui feront de vous un être supérieurement digne. Une chose qui n’a pas de prix, non ? Dis-moi Olivier, surtout n’oublie pas d’orienter ton élève vers une carrière au Quai d’Orsay. Sa place naturelle s’y trouve. Il y fera une très forte impression.

Les autorités. Ah, nos autorités. La grande classe. Mais surtout une efficacité redoutable. Un temps record pour retrouver et placer en garde-à-vue le dangereux policier à l’origine de la diffusion de ces images. Du jamais vu. Il casserait même déjà des cailloux à Cayenne. Par contre s’agissant de nos petits barbares de la RATP, on n’a pas l’impression qu’on s’occupe avec la même célérité de leurs cas. « Ah bon ! ». Excusez-moi mais on m’informe que je raconte n’importe quoi. Les autorités auraient demandé que l’on floute les visages des agresseurs sur les photos, histoire de préserver leur dignité ainsi que leur droit à l’image. Ah cette satanée dignité. De plus elles plancheraient jour et nuit sur une nouvelle loi speciale "bandes" qui mettra fin à ce genre de dysfonctionnements comportementaux, selon un vieux et très Verbeux principe biblique, « que la paix soit et la paix fut ». Une nouvelle loi alors qu’on ne donne pas les moyens à la justice d’appliquer celles déjà existantes. Mort de rire. Aussi drôle que les propositions de l’opposition, « plus de prévention ». Prévention ? Prévenir quoi et qui exactement ? Tu parles ! Je t’inverserai enfin le principe de double peine, moi et fissa. Ben oui, jusqu’à présent c’est nous qui non seulement nous cognons (c’est le cas de le dire) ces connards de fafounets à casquettes et qui en plus casquons pour que la justice les garde au chaud quand elle décide enfin de sévir. Personnellement je renverrai chez eux tous ces xénophobes allogènes qui crachent sur la France, ses lois, et les Français. De quoi libérer pas mal de places de prison. De quoi donner surtout à réfléchir. Et oui moi aussi je sais faire de la prévention…


Passons à l’opinion publique maintenant. Égale à elle-même. Bovine à souhait. Tétanisée de surprise. Elle a déjà oublié les agressions de masse qui sont produites lors des manifestations lycéennes anti-CPE de 2006. Qu’elle se rappelle de tous ces « sales petits blancs » pris en chasse par de jeunes humanistes à cagoule. Qu’elle se souvienne des images de cette gamine à terre, le visage en sang. Sacrée opinion publique. Elle a déjà oublié les gamins de confession judaïque pourchassés dans le XIXe arrondissement parisien. Elle feint de ne toujours pas savoir que ce genre d’agressions est monnaie courante depuis des années. Même pas de quoi étonner, en temps normal, une troupe de zombies. Enfin, pour moi, c’est du tristement banal et pas que s’agissant de « sales Français » attaqués. Tenez l’autre jour, un ami me racontait qu’il avait assisté à une scène intéressante à Arcueil (région parisienne, 94). Alors qu’il sortait d’une grande surface le voilà qui tombe sur une troupe d’humanistes de cités qui invectivaient en des termes particulièrement fleuris les deux vigiles d’origine africaine non-musulmane qui souhaitaient vérifier leurs sacs. Ce qui a le plus surpris mon pote c’est quand l’une des filles de la bande a dit à son copain « tu ne vas pas te laisser emmerder par un sale nègre quand même ». Allez, une autre pour la route, avant d’enchaîner. L’autre jour mon cousin d’origine Sri-lankaise qui dans son 9-3 a souvent maille à partir avec nos mêmes jeunes humanistes des caves, au motif que son ethnie n’est même pas référencée dans leur livre saint, me racontait que le dernier accrochage s’était conclu encore une fois par un « casse-toi avec ta blanche ». J’oubliais de préciser qu’il est marié avec une Française ce qui les trouble doublement. Que fait SOS Racisme ? Rien à part des guignolades ! Bref, que du banal, sauf pour nos bobovins. Allez enchaînons…

Car j’ai gardé le meilleur pour la fin ; les témoins du lynchage.

Si le conducteur du bus a bien évidemment eu raison de suivre les procédures, la passivité des autres passagers tient quand même de l’hallucinant, non ? Franchement, elle est où la dignité, là ? Au sud, c’est ça ! Comme en 40, direction plein sud, soit à l’échelle du Bus, la porte de sortie. Remarquez, rien de bien surprenant là aussi car figurez-vous que tout ça m’a rappelé une petite scène dont j’ai été l’acteur, il y a de cela quelques mois. Après avoir assisté à une séance de cinéma au Gaumont de l’Aquaboulevard, porte de Balard, à Issy-les-Moulineaux, nous décidons avec mes frangins de grailler un truc vite fait au McDo. La foule est nombreuse à se presser aux différentes caisses. Parmi cette foule, nous remarquons deux files plus loin que trois crânes-encapuchonnés jouent des coudes histoire d’avancer plus vite. Tout à leur manœuvre, ils n’ont pas entendu que l’hôtesse qu’ils souhaitaient atteindre venait d’indiquer aux clients qu’elle allait bientôt fermer sa caisse, ce qui expliquait pourquoi il y avait peu de monde devant elle. Nos trois lascars ayant pris le peu de monde pour une aubaine et non une prochaine cessation de service déboulent derrière le dernier client. L’hôtesse leur signifie qu’elle ferme. Ni une, ni deux, les « vas-y » commencent à pleuvoir avant de donner lieu à des demandes plus impératives puis à des insultes à base de « pute » devant la fin de non recevoir exprimée par la demoiselle. Franchement, vous croyez que les clients immédiatement autour seraient intervenus pour demander à nos humanistes de cages d’escalier de cesser leur cinéma. Non ? Pas un ! A quelques mètres de là, nous leurs demandons d’arrêter leurs insultes. Demande accueillie par un « nique ta race ». Un « nique ta race » qui appelle en retour de ma part un « qu’est-ce qu’elle a ma race ? Elle ne te plait pas ma race ? T’es un cousin de Le Pen ? » Que n’avais-je pas dit là. Nos trois lascars laissent la petite demoiselle et s’approchent de nous en nous insultant. Le mâle alpha de la bande approchant même son crâne du mien selon ce rituel très prisé chez nos amis, s’attendant à un mouvement de recul de ma part qui signifierait alors ma soumission ou un geste brusque qui ne manquerait pas de justifier un premier horion de sa part. Je n'ai pas bougé. Se rendant compte qu’ils étaient trois et nous aussi, ce qui est contraire à leurs règles d’engagement, le rapport de un pour cinq étant préférable, ils s’en vont sans demander leur reste en relevant le menton et en nous tançant du regard, rituel de dignité propre à cette racaille. Vous savez quoi ? En prenant nos plateaux-repas, ce n’est même pas nos crânes-encapuchonnés que j’ai vomi du regard mais toute cette foule juste bonne à brouter une Mc-salade. Tas de couards !

Et puis je me suis dit, qu’on n’est pas aux EUA. En France, le courage n’est plus notre trait culturel le plus affiné. On n’est pas du genre à décider de reprendre le contrôle d’un avion transformé en missile par une catégorie d’humanistes pas très éloignée par nature de celle qui nous occupe. C’est qu’on a une dignité à préserver nous, celle qui consiste à se faire enculer en silence, avant de nettoyer le vit ennemi avec le bout d’une langue délicate et raffinée. Ce qui m’amène à me dire que je suis très heureux que l’on ait réintégré l’OTAN car voyez-vous quelque chose me dit que l’on ne va pas tardé à avoir besoin de nos très chers alliés, de ceux qui ont su garder une culture de la riposte et du refus de la soumission. Ben, oui, les républicains de combat ou ne serait-ce que de conviction sont encore bien loin d’être légion dans notre beau pays.

Comme d’autre part, face aux assauts grandissants de toutes ces sections d’humanistes à casquettes et à calottes, je n’ai pas envie de me retrouver dans une même tranchée avec les seuls qui ont gardé une culture du fusil, à savoir nos raclures d’extrême droite ou d’extrême gauche, vous comprendrez que je sois particulièrement content de notre intégration totale dans le club des démocraties armées, la nouvelle ligue de Délos.

« Comment ça les extrêmes seront du combat ? » me demandez-vous.

C’est simple. L’extrême droite le sera par xenophobie et racisme, souhaitant virer de ce pays tout ce qu’elle juge indigne par nature et ce alors qu'une grande partie de l'immigration en question chérit ce pays. Quant à l’extrême-gauche, si pour l’instant elle joue aux idiotes inutiles, je peux vous assurer qu’elle sera des combats, comme en 1941. Elle le sera lorsqu’elle se fera mettre profond par leurs alliés d’un petit soir. Et je peux lui assurer qu’elle fera partie des premières à sentir la dure réalité venir lui chatouiller le duodénum. Je lui fais confiance, elle trouvera même des justifications à ce revirement. Elle commencerait même déjà à en chercher. « Si la tyrannie verte s’installe, combattons-là afin de construire sur les décombres de la démocratie bourgeoise une société plus juste ». Que nos rouges n’oublient juste pas que nous autres démocrates dotés de mémoire serons là, les yeux rougis de larmes, pour leur rappeler leurs compromissions et trahisons passées, leurs rêveries internationalistes pour partie à l'origine du bain de sang et pour les traduire devant le tribunal de l’histoire car nous ne laisserons pas, pas cette fois, aucun de ces putains de totalitaires, qu’ils soient rouges, verts ou bruns, se relever fièrement avec nous de tous les décombres qui s’annoncent. Car oui, cette vidéo n’est pas seulement le reflet d’un présent que beaucoup refusent de voir. Elle est malheureusement de plus en plus celle de l’avenir. Si vous saviez, après avoir couché mes gosses chaque soir, combien je prie le Très Haut Législateur de me donner tort…

SILéonidas

9 commentaires:

RS a dit…

J'adhère..
Mon père dit souvent que le plus grand danger en France, ce n'est pas ce qui vient de l'extérieur. C'est la lâcheté des Français.. Pourtant (c'est mon opinion) il ne faudrait pas grand chose pour que la peur change de camp.. Un peu plus de fierté peut-être..

Anonyme a dit…

Sil, rien de nouveau en Gaule...Comme disait un de mes profs au lycée en forçant la caricature: "déjà sous Vercingétorix les Gaulois on préférer se rendre plutôt que de résister..., alors vous comprendrez qu'en 40, c'était déjà bien ancré dans l'inconscient collectif"......J'adorais ce prof...Je ne sais pas pourquoi...

En bref, dans le métro, il y a quelques années j'ai été la seule à tirer la sonnette d'alarme quand un encapuchonné à sortie sa lame...Les autres ont fait semblant de ne rien voir...

Mais c'est une scène malheureusement quotidienne dans notre beau pays...

Melle E ...

Anonyme a dit…

Salut Sil et le reste du monde,

ton ire est juste mon ami, et je la partage avec d'autant plus de lucidité que j'étais à la place du "sale blanc" de la vidéo, il y a 18 ans de cela ("ah bon, ce n'est pas un phénomène nouveau ?") et pas dans un bus de nuit francilien mais à 11 heures du matin dans le centre-ville de la petite ville de province que j'habite ("ah bon, ce n'est pas un phénomène de banlieue ?").

Je n'ai qu'un truc à ajouter : le courage et la dignité, ça s'apprend dès le plus jeune âge, comme beaucoup d'autres choses. Et où est-on sensé apprendre cela, hormis au sein du giron familial ? Hum ? A votre avis ?

Qui a dit "à l'école ?"

CQFD.

On est pas sortis de cette putain d'auberge !

@+,

LOLO45ETSAPETITECICATRICESOUSL'OEILGAUCHE.

Lapsus van de Zloot a dit…

Comme le dit si bien le proverbe boudhiste:

"Si tu veux connaitre ton passe, regarde ta condition presente. Si tu veux connaitre ton avenir, examine tes actes presents."

SIL a dit…

Et bien mon Lolo et ma Melle E ça fait plaisir de vous relire par ici. Je commençais à croire que vous vous étiez fait prendre par les services secrets saoudiens :-))

eliker a dit…

C'est vraiment excellent.

Cependant...je dois avouer qu'après les déclarations du futur diplomate du quai d'orsay, j'ai un certain plaisir a voir les encapuchonnés lui fracasser la tete. Et j'ai presque envie de serrer dans mes bras tous ces gens qui n'ont pas pris le risque de se casser un ongle pour venir au secours de cette larve. Si l'un d'entre eux avait eu la facheuse idée de mettre son poing a la figure d'une racaille pour aider la lopette, il se serait retrouvé devant les tribunaux avec comme témoin a charge la lopette en question.

C'est pas un encouragement à intervenir.

SIL a dit…

C’est vrai qu’à bien y réfléchir, ces braves témoins méritent toute notre admiration et ont bien fait de servir à cette honorable victime sa propre logique. Puisqu’il aime ça, autant que l’on partage tous son plaisir, agresseurs, témoins, spectateurs et opinion publique…

Je ne suis cependant pas certain qu’il adhère à la notion de lopette ou de larve. Il préférera sans doute celle de dignité passive. Ça revient au même mais comme on le dit souvent à Science-Po, les mots ont leur importance. Ce n’est pas Olivier Duhamel qui me contredira...

Anonyme a dit…

Coucou,
Tu m'as dévoilé SIL...faut que je change de couverture...

Pas grave, je pense bientôt infiltrer la mafia Tang afin de trouver de l'agar agar...

Melle E

PS: Tout va bien chez vous?

SIL a dit…

Tout va mal... nous sommes à court d'agar agar :-(