mardi 30 janvier 2007

QUAND LE PROF SECHE LES CANCRES



De la désagrégation des esprits

"Désolé pour ceux que ça peut choquer" mais quand je vois que l’on érige en mise au clair la confusion mentale et le ressenti plutôt que la réflexion, ça m’hérisse le poil. Or le celtibère galicien ayant le poil dru, vous pouvez imaginez d’ici la tête de l’hérissement qui n’aura pour le coup rien d’une brosse à relire mais plutôt à poncer …alors ponçons !

Si je savais que les envies de nivellement par le bas était plutôt stalino-trotskistes, j’avais oublié que comme condition de la mise en concurrence, on est susceptible de la retrouver également chez certains tenants du nouveau libéralisme, un libéralisme que je qualifierai de social-narcissique et que l’on peut définir comme un système où le social se doit de graviter qu'autour de notre seule pomme…

Alors comme ça, ce jeune homme qui se dit désagrégé de lettres et agrégé de sébums, tient à rappeler au personnel enseignant, alors qu'il n’enseigne pas (sic), que ce corps républicain, plus assez à mon goût malheureusement, vivrait sur une autre planète, serait couvert de privilèges et participerait au gras d’un mammouth bureaucratique…Si ce type d’incontinence cognitive ne se rependait pas massivement tels les fluides d’une pampers® trouée, je rigolerais et en ferais fi, mais comme cela a fortement tendance à s’accrocher aux esprits, le fils de femme de ménage que je suis a décidé d’essuyer….

S'il y a dans ce gloubi-boulga à blog quelque chose de vrai c’est bien le fait que ce messieurs vit en dehors de la planète qu’il décrit. N’avoue-t-il pas qu’il s’est trouvé une planque et qu’il n’enseigne pas. Mais ce monsieur semble détenir des arguments d’autorité qui détonnent. Il est AGREGE….ouah…in agregatio veritas…Il est fils de prof, frère de prof comme si le fils de maçon que je suis me faisait expert d’un métier dont je ne connaissais finalement pas grand-chose avant d’intégrer un corps d’inspection et d’aller enquêter sur des accidents mortels. Désolé mais mon père trop fatigué de ces journées ne nous en parlait pas trop. Je pense qu’il en va de même de pas mal de profs des non-beaux-quartiers.

Comme si le frère du jeune patron que je suis me permettait d’appréhender finement par simple atavisme télépathique toutes les responsabilités et enjeux économiques qu’il a choisi d’assumer et que je n’ai pas choisi moi, et ce bien qu’il m’en parle. Un peu de modestie jeune désagrégé… parle donc de ce que tu fais, ce sera bien plus honnête et profond… mais comme visiblement on ne sait pas ce que ce monsieur fait… Car ce qui se dessine à travers les deux échantillons monographiques familiaux, c’est que ce n’est pas de notre faute si son père, son frère et sans doute lui également vivent sur une autre planète.

Moi-même mon petit gars bien qu’ayant passé 10 ans à l’éducation nationale et bien que passionné par ce sujet, si je veux être honnête, je me dois d’admettre que cela ne me permet pas pour autant d’en connaître toutes les facettes et je dois reconnaître que les 10 ans en question ne sont déjà que des souvenirs ou à la limite un tableau valable pour un moment et une configuration donnée. Si l’on veut résumé, mon vécu de 10 ans dans un collège de la petite couronne parisienne ne sera pas le même que celui dans un lycée de la même ville, que celui ressentit dans une ZEP ou que celui dans un établissement des beaux quartiers. Et si j’ai mon avis sur les profs, l’exposer en aussi peu de phrases et de manière aussi péremptoire que le fait ce monsieur ma paraîtrait…comme une grave faute de réflexion et comme une « cause réelle et sérieuse », pour parler comme dans le privé, de déchéance de mon agrégation.

Aussi comme je ne vais pas le faire, je me contenterai de poser quelques questions ainsi que quelques postulats républicains, qu’il me parait bon de rappeler.

1) Chapitre méconnaissance de l’entreprise

- Rassurez-moi, il me semble bien que quand on faisait des études supérieures, pour les payer, ou pour nos dépenses annexes, que l’on a tous fait ce que l’on appelait des « petits » boulots et qui sont les vrais boulots de bien des gens ? C’est bien ça, je ne me suis pas trompé ! Exit donc l’argument habituel à la con où les profs sont présentés comme incapables de faire autre chose et qu’ils ne connaissent pas le monde de l’entreprise puisque la plupart y sont passés pour payer leurs études.

Mais visiblement ce jeune homme a sans doute vu, comme une petite minorité, ses études intégralement payés par son vilain Papa Prof ou alors avec une condescendance petite-bourgeoise considère vraiment que les boulots de serveur, vendeur, barman, hôtesse, caissier, assistant téléphonique.... qu'il a fait pendant ses études dans des petites ou moyennes entreprises (95% de entreprises française et 50 % du nombre de salariés) ne sont vraiment que des petits, comprenez misérables et pas sérieux, boulots qui ne permettent pas de se rendre compte de la vie en entreprise.

- Dites moi, histoire d’employer un argument à la profondeur aussi abyssale que celui de cet abruti, il me semble que les profs ont des parents, des époux, des frères, des connaissances, des amis, des enfants qui sont passés par l’entreprise, non ? Ils ne vivent quand même pas dans des villages, types "Copland" aux USA, réservés qu’aux profs tout de même ? Si ! Mon Dieu, Profs c’est une secte !!!! Ils logent tous au Mandarom.

2) chapitre privilèges

Un Certifié a du faire au minimum, et nous savons tous que ça l’est, un Bac +3 où il ne représentait à ce niveau là déjà qu’une petite minorité de ceux qui sont rentrés à la fac, puis réussir un concours où les taux de réussite sont inférieurs à 10% .s’il le réussi du premier coup, on peut rajouter 1 année. Puis après concours, on rajoute encore 1 an d’IUFM. On peut donc en conclure qu’au minimum ce prof, crème de la crème universitaire représente un BAC +5. Il s’agit donc, pour parler privé, d’un niveau ingénieur qu'on qualifiera de cognitif.

Or combien gagne cette élite privilégiée. 1200 euros en début carrière ! QUEL SCANDALE ? QUEL NANTIS ? Vous connaissez beaucoup d’ingénieurs qui accepteraient cette rémunération, vous ?

Mais il y a encore plus que crème de la crème, L’agrégé. Pour obtenir l’agrég, il faut là BAC +4 minimum et le concours est encore plus darwinien. Et combien gagne cette élite du savoir, bien qu’au vu du cas du crétin présent, cela ne suffit pas toujours, ce monsieur démontrant que la crème peut dégouliner où s’avarier s’il y rupture de la chaîne de la tête froide. Bien, cette élite de l’élite gagne en début de carrière sensiblement la même chose à 100 euros prés.

Alors notre ami bien informé va me répondre qu’ils grimpent vite, s’ils survivent aux premières salves des cancres. Perdu ! Un agrégé en ZEP avec 8 ans d’ancienneté gagne……….2350 euros…. 15 000 balles. Quel grand ingénieur sorti des Mines, quel grand manager, quel directeur commercial sorti d’HEC ou de l’ESSEC accepterai après 8 ans d’ancienneté 15 000 francs ? Le premier qui me dit qu’il en connaît va au piquet avec le bonnet d’âne de la mauvaise foi.

Alors le super-informé par les déBLOGS me répondra que le prof a les vacances ! Perdu mon petit gars ! Le salaire des profs du public, comme ceux du privé sont constitués de 10 mois de salaire payés sur 12 mois. Leurs 2 mois de congés d’été ne leur sont donc pas payés. Il leur reste donc 7 semaines de congés payés. Il me semble que bien des conventions collectives offrent à leurs cadres 8 semaines de vacances en cumulant les 5 semaines + 15 jours de RTT.

Le super-déformé me rétorquera qu’un agrégé ne fait que 15 heures de cours et un certifié 18… Na ! Retourne donc au coin. S’il fut un temps, qui certes peut perdurer dans certaines failles spatio-temporelles de centre-ville, où des profs, peu zélés, maîtrisant leur programme et avec des classes homogènes pouvait faire un nombre d’heures en deçà des 39 heures et donner des cours particuliers comme l’a fait remarqué la Bécassine poitevine candidate du PS, ce n’est plus le cas depuis longtemps. Cette dame habitant Boulogne comme notre agrégé des beaux quartiers parlent d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître ou de lieux présents que la majorité de profs ne connaîtra jamais. Encore que je n'ai au fond rien contre les profs d'établissements de centre-ville et leurs revendications de reconnaissance tout autant légitimes. Cela étant, ceux-ci mis à part, la plupart des profs pourront vous dire que depuis le collège unique, les classes hétérogènes, les perpétuelles innovations pédagogiques, les fréquents changements de manuels, l'instauration de la réunionite venue du privé, la mise au centre du système du narcissisme des élèves et de leurs parents, que le plafond des 40 heures hebdomadaires, même depuis le passage aux 35 heures, à depuis longtemps sauté. Si les profs ne s’adaptaient pas à tous ces nouveaux éléments "quantiques", je peux vous dire que le système, avec toutes les aberrations que les soi-disant innovateurs cherchent à lui faire avaler, aurait déjà implosé… Agrégé de mes canaux séminifères, va !

Par ailleurs. Cela fait longtemps qu’ils n’ont plus l’autorité qui faisait que devant un enseignant on se levait ou on s’inclinait. C’est à longueur de temps qu’ils subissent les humeurs des mouflets, les caprices des parents, les taquineries gestionnaires de leurs administration, qu’ils s’achètent eux-mêmes une partie de leurs fournitures, qu’ils impriment cours, transparents, fiches d’activités à leurs frais, qu’ils utilisent leur propre matériel informatique. Il me semble que le Code du travail, DU PRIVE, impose à l’employeur de « mettre à la disposition de ses salariés les moyens visant à l’exécution du contrat de travail », non ?

Quant à l'aspect "rendre des comptes", c'est à toute la société que les profs doivent rendre des comptes: justification devant les élèves; devant les parents d'élèves; devant les délégués de parents d'élèves présents aux CA; devant les responsables des collectivités territoriales présents au CA; devant les acteurs sociaux présents dans les établissements à travers les Groupes Ecoute et Concertation où autres soi-disant jury populistes déguisés en groupes d'action concertée ou d'échanges d'infos visant à plus d'efficacité (représentants PMI, médiateurs du Conseil General, educs-spé). J'y ai vu personnellement des educ-spé ou des psy de la PMI expliquer au corps enseignant comment ils devaient voir leur métier et leurs priorités; devant l'administration qui se comporte de plus en plus en petit chefs gestionnaires qu'en chefs d'établissement; devant l'inspection académique, rarement certes et légitimement néanmoins puisqu'il ne s'agit pas faire croire ici que prof c'est une profession libérale; justification devant les collègues grâce à la grande trouvaille behavioriste en vogue aux EUA mais déjà expérimentée depuis longtemps et avec succès dans les cellules du parti stalinien consistant à travers la notion de travail collectif, d'équipes éducatives, à faire en sorte que le travail nécessaire d'une hiérarchie directe, donnant des directives claires, valorisant le travail des enseignants, sanctionnant les brebis galeuse, assumant ses responsabilités en sorte, s'exerce anarchiquement et inefficacement par la surveillance mutuelle entre collègues. "Camarade, il t'incombe de faire ton examen de conscience». Sérieusement, quel autre travailleur qualifié accepte de se voir enseigner son boulot par l'intégralité de la société ?

Sur "la prime de charbon", quant on voit les « Drames » que sont capables de faire certains commerciaux pour leurs frais de « portable », « mes gages, mes gages », à quel point les syndicats de salariés (bien des salariés du privé ne sachant même pas que les syndicats leur négocient leur convention collective) se battent à raison pour le maintient que certains "avantages" conventionnels du même ordre que ceux que cet abruti critique sous la dénomination de « prime de charbon ». Vous en connaissez beaucoup des salariés acceptant de sacrifier dans une joie schtroumphesque les éléments de rémunérations liés à leur contrat de travail ?

Du coup il ne reste plus au désagrégé que l’arme ultime, l’argument massue de Thor : « Vous n’avez rien à réclamer puisque vous faites se métier par vocation ». C’est fort non ? Déjà, il est de rappeler à ce type de butor que là les Profs ne réclament rien de plus. Ils ne font que refuser une dégradation supplémentaire…Par ces temps de confusion mentale et dialectique il me parait bon de rappeler que c’est pas pareil. SOCRATE revient, la dialectique se perd, le sophisme nous gagne ! Ensuite j’ai toujours trouvé ce type de rhétorique géniale. Cette rhétorique dispose en effet de deux arguments imparables pour les hypothalamus fistés. Quand le parano revendicatif estime que le fonctionnaire en a trop, il dit qu’il est PRIVILEGIE…mais comme toute névrose est traversée d’éclairs de lucidité…quand il se rend compte que les fonctionnaires sont en droit de réclamé plus….il nous ramène à notre « VOCATION ». Formidable non ?

Dans un dernier souffle de rage, l'imbécile jouant le sans-culottes Diesel® nous criera "Ah bas les privilèges!!!" . Quand je vous parlais de confusion mentale....De quels privilèges parle-t-on? Celui où une minorité, une caste aristocratique hérite des bénéfices de sa seule naissance, vit grassement du travail de ses paysans, serfs ou esclaves tout en ayant pouvoir de vie ou de mort sur ceux-ci et le contrôle du pays... et cela serait à mettre sur le même plan que les profs, les fonctionnaires. En guise d'héritage, les profs se sont donnés les moyens de réussir études et concours. Ils n’ont pas hérité. Ils ont mérité. En guise d'oisiveté, les profs n'ont pour seul privilège que celui de travailler toute une vie au service de la France. S'ils ne connaissent pas le chômage, ils ne bénéficient pas non plus des ASSEDIC qui pourrait être taxé de privilège avec ce genre de déraisonnements. En guise de pouvoir de vie ou de mort, certains, forts rares, encore heureux, ont surtout le privilège de la subir...

3) chapitre il y en a marre

J’indiquerai à ceux qui ne voudraient voir en moi qu’un vil fonctionnaire de plus que je ne m’ancre ni dans la bureaucratie, ni dans un collectivisme quelconque mais que je suis un bon social-démocrate tendance scandinavo-Jacobine doublé d’un indécrottable républicain dans la ligné de Clemenceau, un Clemenceau qui ne souhaitait pas "voir pousser des impôts là où on plantait des fonctionnaires" mais un Clemenceau qui souhaitait une République forte, République forte qui s’appuyait sur une Ecole forte.

Alors certes il y a effectivement des fonctionnaires, et pas que les profs, totalement incapables de penser autrement qu’en fonctionnaires, ceci valant tout autant pour les salariés du privé puisque tout corps institué, quelqu’il soit, souhaite voir grandir son pouvoir, souhaite façonner la réalité à l'image de son seul prisme analytique.

Je ne vois cependant aucun rapport entre les nécessaires reformes de l’état et de son administration avec la défense de son bifteck par le corps enseignant. Par ailleurs si l'on suivait au final la logique individualiste du type de discours ici dénoncé, les profs seraient en droits de répondre, a minima, à ceux qui ne pensent de leur coté qu’à leur gueule, « puisque c'est ton souhait...chacun pour soi mon pote et la grève pour moi ! »

Et là encore qu’on m’arrête si je me trompe, il me semble que l’écrasante majorité des manifs enseignantes ont été faites pour les élèves et rarement pour leurs conditions de travail dégradées, dégradantes, dangereuses ou de salaire. En général il faut que l’un d’entre eux se prenne un coup de couteau pour qu’ils se réveillent. Alors voila que les profs se réveillent tout seuls, se refusent à se voir humilié un peu plus, osent répondre alors que ces éternel premiers de la classe devenus adultes gardent le réflexe de la fermer devant plus haut placé ou devant les cancres.

Voila qu’ils osent et que les poujadistes pestent. Je ne dirai qu’une chose aux profs. Bien, "il était temps mes petits cocos" ! La République ce fut vous. Il est temps que le République se soit à nouveaux vous et puisque la République n’impose pas le respect qu’on vous doit, vous n’avez qu’à l’imposer vous-même y compris en faisant chier tous les crétins qui ne voient dans l’école qu’une garderie en libre service, où le prof n’est plus celui qui détient L’AUCTORITAS, le savoir, les outils pour former des citoyens éclairés. Puisqu’’il est venu le temps du diktat de l’opinionariat, que les gardiens du temple de la Raison se révoltent et affirment le pouvoir qui est le leur.

Car ils l’oublient bien souvent. En ayant obtenu leurs concours, ils ont obtenu la légitimité qui fait d’eux les représentants de la République, du Peuple et de l’Intérêt Général.

Alors si en social-democrate, en Républicain j’ai profondément conscience que tous les membres de la société quelqu’ils soient, sont dans le même bateau et doivent tirer la couverture vers l’intérêt général plus que vers les particularismes, que je suis pour une solidarité collective à pied égal avec une responsabilité individuelle, je sais également et surtout ce qui a fait notre République et je ne sacrifierai jamais ses temples et ceux qui les gardent à tous les égoïsmes, à toutes les hyènes de notre société. Ce ne seront jamais les intérêts mercantiles, les égoïsmes consuméristes qui élèveront le citoyen. Seul le savoir élève l’Humain. Seul l’école forme le citoyen éclairé et je m’opposerai y compris avec véhémence à l’expression victorieuse d’un poujadisme ambiant qui espère réussir à jeter le Privé contre le Public afin de mieux privatiser toute la société….pour le seul bénéfice des véritables privilégiés... les Aristocac.

Au passage, que l’on ne vienne pas après-coup pleurer dans les bureaux du Service de moins en moins Public en le prétendant moins à l’écoute du public puisque c’est le désir de privé qui le rend ainsi, faute de quoi je ne me priverai pas de renvoyer ce type de citoyen à ses responsabilités de citoyen.

Il serait vraiment temps que la seule sphère légitime dans pas mal d'esprits cesse d'être la planète où le renard libre cours dans le poulailler libre, comme le suggère ce monsieur, et qu’on redescende tous sur une même planète celui de notre Matrie, celle de l'Intérêt General où tous les mérites, toutes les énergies déployées ont un sens, une utilité et une même légitimité... tant pis pour les jaloux.

SIL vénère ! Fils de Marianne et de son école