Bon, alors, il faut que je vous dise que je me suis fait sévèrement pourrir la tête lors du repas pascal par toute ma tosserie. Un vrai Golgotha. L’objet du saint courroux familial ? Le fait d’avoir osé dire dans mon billet de Saint-Valentin que le brésilien est une langue bien plus belle et romantique que le portugais. « Comment oses-tu ainsi trahir ton sang ? » m’a-t-on servi entre deux tranches de gigot. Le tout suivi d’un « de toute façon, avec ton goût pour le métissage, je suis certain que tu n’as jamais aimé une Portugaise ; du coup comment pourrais-tu savoir ce que c’est d’aimer en portugais ? »
Vous me connaissez, face à une remarque aussi fallacieuse je me suis bien évidemment défendu. D’une part si mon sang a effectivement les idées larges, il n’oublie rien de ce qu’il est, tas de sanguinistes. D’autre part, j’ai bien évidemment déjà aimé en portugais ; l’un de mes plus beaux amours d’ailleurs.
Ce genre d’explication ne leur ayant pas suffi, ils ont exigé que j’expie ma faute brésilienne en pondant un billet à la gloire des chansons d’amour portugaises. Ah les petits peuples, ayant joué les empires, torturés depuis par une susceptibilité on ne peut plus ridicule !
Ce faisant, bien que préférant les chansons catholibertaires dont les Portugais on le secret, et dont je vous reparlerai lors d’une prochaine session musicale, pour n’en demeurer pas moins un garçon serviable, comme presque tous ceux de mon sang, je vous propose trois chansons d’amour en portugais que je pourrais écouter en boucle pendant des heures et dont je vous ai traduit les paroles.
Voici pour commencer « tudo o que eu te dou » ( tout ce que je te donne). En 1994, Pedro Abrunhosa lance une bombe musicale, « viagens » (voyages). Un album jazzy, funky, aux textes généreux, aussi sexys que tendres, où rien n’est à jeter et qui marquera les esprits avec des chansons telles que « nao posso mais » (refrain : je ne peux plus rester ainsi, penser à toi, sans t’avoir tout contre moi) ou « socorro » (refrain : Au secours, je tombe amoureux, il m’est impossible de résister à autant de charme). La toute dernière de l’album étant quant à elle un vrai petit bijou de romantisme. « tudo o que eu te dou ».
« Je ne sais pas ; ce que je peux être de plus ; un jour un roi ; l’autre jour sans appétit ; parfois puissant ; un courage de lion ; parfois si faible ; le cœur est ainsi fait.
Je ne sais pas ; ce que je peux t’offrir de plus ; un jour des perles ; l’autre jour un clair de lune ; cris de douleur ; cris de plaisir ; qu’un homme également pleure ; les jours où c’est ainsi.
Si nombreuses furent les nuits ; sans dormir ; nombreuses les chambres d’hôtel ; s’aimer puis partir ; des promesses perdues ; actées dans les airs ; mais c’est ainsi que je sais…
Tout ce que je te donne ; tu me le donnes aussi ; tout ce dont j’ai rêvé ; tu le seras ainsi ; tout ce que je te donne ; te me l’offres aussi ; tout ce je te donne.
Sur le fauteuil ; tu embrasses ma peau bronzée ; exécutes tous ces gestes ; que t’as appris au ciné ; encore, j’en redemande ; tu me transportes loin déjà ; arrête, recommence ; laisse-moi juste encore y croire.
Non ! me réponds-tu ; mais ton regard a menti ; enlacés sur le sol ; dans l’étreinte que j’y voyais ; est-ce l’aurore ; ou est-ce une hallucination ; des étoiles aux mille couleurs ; extasie ou passion ; hmm, ce parfum ; m’apporte tant de mélancolie ; me tue d’amour ; me rend ma liberté ; me fait voler ; chanter ; m'endormir. »
Le groupe Santos&Pecadores est l’un des groupes phares de la scène rock portugaise, remarquable par un son cuivré inspiré de la soul et du Funk. Du plaisir à l’état brut apporté principalement par son chanteur Olavo Bilac, reconnaissable à sa voix rauque et à sa petite gueule d’amour. Parmi leur discographie, le live « tu », sorti en 1997, est sans doute la pièce maîtresse. On y trouve l’une de leurs plus belles chansons d’amour, l’une des plus originales aussi, « nao voltarei à ser fiel » (plus jamais, je ne serai fidèle). Depuis ce titre culte, ils se seront également illustrés avec « horas de prazer ( refrain : des heures de plaisir que je n’échangerai contre rien) et « fala-me de amor (parle-moi d’amour) dont voici le texte :
« J’ai fini par nourrir, un faible pour toi ; venu comme il est venu ; que je n’ai pas cherché à comprendre.
Je me demande où en est, cette vieille certitude ; saurais-tu me dire, ce qui a mal tourné. Car c’est qu’aujourd’hui, je savais enfin dire.
Refrain : Aime-moi, emporte-moi, au-delà de mon horizon, en me parlant d’amour ; parle-moi d’amour.
J’aimerais te dire, que je suis encore ici ; tout ce temps, en t’attendant.
Je veux te toucher, et demande ainsi, à redevenir ce que j’étais, lorsque je t’ai connu. »
Et voici le meilleur pour la fin, Paulo Gonzo, une voix, des textes que l’on savoure comme une bonne infusion au coin du feu. De celles qui vous aident à digérer le passé, à préparer une nuit qui vous habiterez de rêves agréables. Paulo Gonzo, ce sont surtout deux titres d’anthologie « dei-te quase tudo » (refrain : je t’ai presque tout donné mais presque tout était de trop ; je t’ai presque tout donné, remballe maintenant toutes tes signaux) et surtout celui qui suit « jardins proìbidos » (jardins interdits).
« Dès que tu t’éveilles, dans les airs, s’anime la lumière spontanément ; et même le jour vient doucement, rien que pour te voir.
Et déjà conquis, il t’observe revenir, de ce monde rien qu’à toi, où j’aimerais tant, entrer un jour, afin de m’y perdre.
Refrain : afin de me perdre, dans ces recoins, où tu te promènes toute seule, sans moi. Je brûle de jalousie, de ce jardin, où n’est admis que celui que tu choisis ; où tu es la reine de toutes les éternités. Telle est ma croix, joyau de lumière, parmi toutes les femmes.
Le temps se brise, sur ton regard, dans ce geste impudique ; le ciel se déchire, et moi, je me précipite afin de m’y perdre… »
Voilà pour aujourd’hui !
SIL qui s’en va écouter un petit morceau de sœurs Corr, car s’agissant d’amour à la portugalicienne, je retrouve dans les textes de mes cousins irlandais assez souvent la même sensibilité. « Runaway » (clip sous-titré en portugais).
2 commentaires:
Quel romantique notre Sil !! Merci de m'avoir fait connaitre le chanteur de "tudo o que eu te dou" un petit coté Tom Waits en moins imbibé..et surtout une interprétation plus sensuelle (forcément avec moins d'alcool !!) Un jour ou une nuit, traduisez nous une chanson de Maria Bethania ; c'est une "vieillerie" , je n'y comprends rien, mais je trouve cela très beau.
Castor
Ah Maria Bethania, la grande Maria Bethania, chez qui tout est sublime. Promis, ça va être difficile de choisir, mais promis j’en traduirai…
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