dimanche 31 août 2008

MEFAITS DIVERS ET JEUX D’ÉTÉ


Si jamais vous rentrez ces jours-ci de vos congés bonifiés, passés à l’autre bout du domaine français, vous avez sans doute raté le festival des mouvements de troupes pacifistes et leurs sublimes chorégraphies, qui a eu lieu cet été. Je vous comprends. Quand on retourne chez les siens aux Antilles, à la Réunion ou dans d’autres DOM et TOM, on estime que c’est suffisamment rare pour ne pas perdre de temps avec tous ces défilés de frocs baissés du côté de la métropole. Aussi ce résumé de la trêve olympique est pour vous. Allons trêve de plaisanteries. Quoi que non après tout. Continuons.

Car avouez que si les victimes humaines de cette comédie dramatique n’étaient pas bien réelles, il y aurait de quoi rire à gorges déployées. Rions au moins par dépit, en mémoire des victimes. Action!

Sérieux, rien à redire, le rythme du film est bon. Ça démarre même sur les chapeaux de roues, avec notre président qui invite à notre fête de la Liberté, tout ce que le pourtour méditerranéen compte de tyrans. La touche d’humour résidant dans la lecture de la déclaration des droits de l’Homme par Kad Merad, l’acteur « beurichon » des « Ch’tis » mais surtout l’un des plus grands spécialistes de l’humour non-sens à la française. Il fut un temps où la communauté européenne ouvrait ses bras aux pays européens qui embrassaient la démocratie. La Grèce, le Portugal, l’Espagne puis les pays de l’Est. Voici le temps où l’Union se fait autour de la compromission avec les tyrannies. Beau projet !

Histoire de démontrer l’efficacité de notre générosité diplomatique, on a pu voir, dès le mercredi 16 juillet, le Liban s’illustrer dans l’horreur en accueillant avec les honneurs dus aux plus grands bienfaiteurs de l’humanité, les terroristes qu’Israël avait libérés contre deux dépouilles de soldats israéliens.

Parmi ces assassins figurait ce psychopathe de Samir Al-Kuntar qui, lors d’une attaque menée dans le nord d’Israël en 1979, avait tué deux policiers puis un père et sa petite fille Einat, âgée de 4 ans, en lui défonçant le crâne contre un rocher avant de s’acharner sur son petit corps agonisant à coup de crosse de fusil. Sublime image que celle du tout récent président Sleimane lui donnant l’accolade. Mes chers amis Libanais, à l’évidence, vous avez vendu votre âme au diable et je peux vous assurer que vous n’avez pas fini d’en payer le prix !

Enfer toujours. Moins de deux semaines plus tard, la Ligue Criminelle Arabe manifestait comme un seul homme son soutien total et entier au président soudanais Omar Hassan Al Bachir, sous le coup d’une inculpation pour crimes contre l’humanité au Darfour. Rien de bien étonnant comme je l’indiquais dans l’un de mes premiers billets sur le Darfour. Arabes über alles !

Puis vint l’ouverture des jeux du cirque de Pékin. Notre président à qui l’on n’impose pas son calendrier diplomatique se rendit, grand-prince, dans l’empire du milieu en expliquant à notre presse, qu’il était préférable de parler aux Chinois plutôt que l’inverse, espérant ainsi les amener vers nos valeurs, celles du pays des droits de l’Homme.

Vraiment excellent ce discours paternaliste adressé à une civilisation multimillénaire avec Poutine en arrière plan de l’image. Un peu comme dans un Eastern spaghetti où notre président jouerait « le bon » et Poutmedev ou Medvedin, deux en un, jouerait « la brute et le truand ». Si vous saviez, Monsieur le Président, où les Chinois seraient susceptibles de vous inviter à carrer votre déclaration des droits de l’Homme, vous seriez surpris. Moi pas. Incroyable !

Le seul qui tint un discours de circonstance, à portée universelle et non-paternaliste, fut Georges Bush qui lors du dîner de Gala, et avec son paternel en arrière-fond, expliqua sans se démonter que chacun fait ce qu’il veut chez lui mais qu’enfin tout de même, « les pays où existe la liberté d’expression se portent mieux que les autres ». Tu l’as dit Bushy !

Tiens en parlant de notre président, du russe et du nord-américain à Pékin, le théâtre géorgien nous offrit dès que ces messieurs remontèrent dans leurs avions respectifs un magnifique spectacle d’ombres chinoises. Vraiment magnifique !

Don Poutini campa son rôle de mafieux radioactif à la perfection pendant que le sergent Georges, toutes sirènes hurlantes, ne perça pas trop l’écran dans son rôle de shérif. Ça m’a rappelé le dernier Batman, où le vilain semble mieux jouer sa partie que ce héros devenu un tantinet neurasthénique. La palme d’or allant toutefois à notre président, particulièrement remarquable dans son interprétation d’avocat de Don Poutini, le parrain du syndicat du Krimilein. « Eh petit, viens donc par ici ! »

Pour tout vous dire, je dois vous avouer qu’un doute m’a traversé l’esprit. J’ai cru un moment que notre président avait pris à l’OMC sa carte de représentant placier en vaseline, tant on le vit tendre avec insistance au président Saakashvili un tube de la main droite, tout en lui montrant le verre pilé qu’il tenait au creux de sa main gauche. Genre, « voici ce avec quoi les Russes avaient prévu de régler ton affaire. Voici ce que je t’ai obtenu ».

Il est vrai qu’étant donné le mépris racial que ressentent ces Russes pour les caucasiens, le pilonnage des Géorgiens était probable. Le président Medvedev ayant parlé des Georgiens, lors d’une conférence de presse commune avec le président Sarkozy, comme d’une « racaille incontrôlable dés qu’elle sent l’odeur du sang ». Et dire que ces caucasiens d’Abkhazes ou d’Ossètes accueillent ces racistes de russistes comme des libérateurs. Spasiba !

Reconnaissons tout de même, histoire d’être juste avec notre président, qu’il a sans doute évité la chute de la capitale géorgienne et le triste symbole d’un président géorgien en fuite. C’est déjà ça !

S’agissant des autres acteurs, on peut dire que nos analystes sont restés fidèles à leur lamentable réputation. Nous avions-là de très mauvais figurants. J’ai adoré quand je ne sais plus quelle urbaine sommité nous expliqua que les « Russes savent bien jusqu’à quel point ne pas aller ». Et moi de m’esclaffer « mais les Russcof, ce sont des gros pécores, redevenus des satanés rustauds depuis l’effondrement de leur surmoi marxiste. Et moi je m’y connais en pécores. Une fois déchaînés, les payouzes sont capables de tout. Bien qu’il m’en coûte de le dire, en attendant qu’une démocratie libérale s’installe, seule la bourgeoisie d’affaires peut sauver la Russie en cherchant à maintenir les liens qu'elle a établis avec l'occident. Da tovaritch ! »

Plus récemment d’autres analystes aux talents de pétomanes nous ont fait le coup du complot americano-sionniste. Voyez-vous ma petite dame, les neo-conservateurs nord-americains auraient besoin d’une Russie flippante afin de remporter les élections présidentielles et de mobiliser l’Occident. Visiblement l’islamisme ne suffit plus. Israël ayant de son côté besoin de retrouver le rôle incontournable qu’il avait pendant la guerre froide.

S’il est indéniable que les Israéliens et les nord-américains soutiennent la Georgie, j’aimerais toutefois que l’on m’explique où serait l’intérêt des nord-américains et des Israéliens à fâcher tout rouge-brun nos cousins Russes, les poussant ainsi un peu plus dans les bras de la Chine, de l’Iran et d’autres organisations islamiques. Des tentations russes qui s’expriment depuis quelques temps et dont le passage à l’acte serait à terme désastreux aussi bien pour les Russes que pour tout le camp occidental. Nân, que les conspirationnistes me proposent un meilleur scénario. Celui-là sent le pet foireux !

Last but not least, nos journaleux présents sur la scène géorgienne sont allés quant à eux au-delà de toutes mes espérances.

Alors qu’une bonne partie de notre presse a été l’une des rares au monde à ne pas avoir trouvé la moindre justification valable dans l’intervention nord-américaine en Irak, à avoir souhaité la défaite américaine, à continuer d’ignorer sa victoire, d’ignorer que le pouvoir a été remis entre les mains des Irakiens et la situation sécuritaire largement améliorée, jouissant du moindre attentat à Bagdad pour se donner raison, la voici qui trouve toutes les excuses possibles à l’intervention russe. Les Géorgiens et leur Saakashvilain de président auraient bien cherché celle-ci. De toute façon ils n’avaient qu’à pas taquiner l’ours russe.

Excusez-moi mais il faut que j’aille vomir…

Me revoilà car je ne pouvais pas conclure cette trêve olympique sans parler du Tibet. C’est moi ou l’on nous avais promis que ces jeux seraient peut-être une chance pour les tibétains de se faire entendre. Euh…

Une chance pour le dalaï-lama alors ? Oui car si on n’entend pas trop la souffrance du peuple tibétain, on entend largement s’exprimer l’incarnation de ce qui a fait souffrir le Tibet quand il était au pouvoir, s’exprimer l’un des rares à ne pas souffrir de cette occupation puisque le pouvoir de parler au nom du Tibet, cette tête de gong de Dalaï-Lama l’a gardé tout comme un tas d’autres prérogatives.

Ce parasite intestinal du peuple tibétain n’a sûrement pas à être reçu, les deux mains jointes et la tête baissée, par nos représentants, que ce soit pour des considérations laïques ou bien politiques. Ce guignol en tongs, je le prends au mot. Puisqu’il est la réincarnation de tous les dalaï-lamas précédents, je me permets de lui rappeler son bilan.

Le combat mené contre le Bön, la religion qui précédait la sienne au Tibet ; la réduction à l’état de servage de la population tibétaine ; le justification karmique de la souffrance au lieu de la recherche des solutions qui l’atténue ; « il n’y a pas de souffrances injustes, mais le résultat d’un mauvais karma » disait-il en parlant du tsunami de noël 2004 ; la xénophobie qui a longtemps prévalu au Tibet ainsi que la misogynie et l’ homophobie qui prévalent encore dans sa pensée ; un système judiciaire digne de la charia…

Il paraîtrait que son titre signifie « océan de sagesse ». Tu parles d’un océan. Une rigole, oui !

Pour ce qui touche au présent, ce « souverain très précieux » se serait converti à la démocratie laïque et aux droits de l’Homme. Comme quoi notre sagesse politique semble suffisamment belle pour séduire le plus grand des bouddhas vivants. Ceci expliquerait la lente démocratisation du gouvernement tibétain en exil avec depuis 1990 l’élection de celui-ci au suffrage universel par la diaspora tibétaine et non plus sa désignation par l’autre « joyaux accompli ». Bien, bien, très bien !

Par contre si je ne reproche pas trop à cet océan de vérité, multi-réincarné, de ne pas avoir pensé tout seul à la démocratie, je m’étonne quand même qu’il ne vive pas à fond comme tous les nouveaux convertis sa nouvelle religion occidentale. Pourquoi ne demande-t-il pas aux représentants du peuple tibétain en exil, et notamment au « Kalon Tripa », le premier ministre, de nous montrer leur fraise. Personnellement ce sont ces gens-là que j’aimerais entendre nous parler du peuple tibétain. Mais après tout, peut-être que la démocratie est une spiritualité trop exigeante pour que le dalaï-lama l’observe de son vivant. Sa démocratie n’est peut-être pas de ce monde ?

Et dire qu’il y a chez nous suffisamment de péquins de base, d’artistes, d’hommes et de femmes politiques pour se pâmer d’admiration devant ce moulin à prières, cette ombre mongole de la spiritualité. Les Occidentaux sont décidemment de grands enfants. Comme tous les gosses, ils adorent les ombres chinoises. Surtout nos bobodhistes.

Finalement, cette trêve olympique n’était qu’un jeu d’ombres chinoises, un jeu de mains, deux doigts d’honneur qui vous font une colombe olympique. Or comme le dit un proverbe non pas chinois mais bien de chez nous, « jeu de mains, jeu de vilains ».

SILddharta, océan de sagesse et petite mare à vilains crapauds.

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