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vendredi 19 mars 2010
Le soufisme du Dr Tahir ul-Qadri ou l’islam primitif comme avenir de l’islam ? (aujourd’hui, c’est vendredi, jour de prêche)
Vous trouverez ci-après la traduction, par votre infidèle serviteur, d’un entretien accordé par le Dr Tahir ul-Qadri à Russia Today, où il revient sur sa récente fatwa contre le terrorisme mais aussi sur la notion de djihad. Un entretien très intéressant, même quand on ne partage pas tous ses points de vue. Mais avant ça, voici une petite introduction maison.
Au sein de ceux qui s’opposent aux islamistes ou plus largement à l’idéologie islamique, deux façons d’appréhender le soufisme se dessinent.
Une première considère que le soufisme (sorte d’islam mystique, jugé comme plus ouvert et tolérant) et l’islam orthodoxe (toutes tendances confondues) sont les deux faces d’un même islam, pour la bonne raison que le soufisme ne renie pas grand-chose de la doctrine islamique classique. À titre d’exemple, les tenants de cette vision rappellent que la très agitée Tchétchénie répond à un islam d’obédience soufie. D’autres considèrent même que le soufisme sert de miroir aux alouettes, de produit d’appel séducteur pour infidèles ignorants de la réalité totale de l’islam. En gros le soufisme serait le rouge à lèvres sur le cochon islamique. Ce en quoi ils n’ont pas totalement tort tant semblent nombreux les intellectuels occidentaux à résumer benoîtement les fondements de l’islam à la jolie vitrine soufie.
Toutefois, une deuxième façon d’appréhender le soufisme est possible. Avec toute la prudence de celui qui ne se fait pas trop d’illusions, comme je l’ai déjà expliqué dans ma série « l’islam des lumières, une vulgaire éclipse lunaire » (ici, ici, et là), je fais partie de ceux, à moins que je ne sois le seul (à vous de me le dire), qui considèrent que le soufisme sera l’un des deux pieds qui fera avancer une possible reforme de l’islam, que le soufisme peut être la face complémentaire à une critique radicale et voltairienne de l’islam.
En effet, aussi légitime qu’apparaisse la critique de l’islam, y compris la plus virulente qui soit, il est totalement déraisonnable d’envisager ou d’exiger que plus d’un milliard de musulmans puissent abandonner aussi radicalement que brutalement la foi comme la loi de leurs ancêtres. La Chrétienté ne l’a pas fait. Pourquoi le ferait le monde islamique (l’Islam) ?
Par conséquent il importe que parallèlement aux puissants coups de boutoirs portés par les Voltaires d’Islam (les Wafa Sultan, Ayaan Hirsi Ali…), seuls capables de ramollir l’islam ainsi que ses officiants, qu’une alternative spirituelle et religieuse islamique ou arabe soit disponible, aussi hétérodoxe et de « mauvaise foi » soit-elle.
Et c’est là qu’intervient la vision soufie de l’islam proposée par le Dr Tahir ul-Qadri. Une vision qui en appelle à la démocratie, à la liberté de conscience, une vision susceptible de conduire à un apaisement de l’islam (la religion) comme de l’Islam (le monde islamique), à un Islam des lumières. Une vision et un message à encourager.
Bon, maintenant, de vous à moi, j’aimerais bien que le Dr Tahir ul-Qadri m’explique comment il compte régler les problèmes que posent la Sunna et la Sira, l’ensemble de la tradition juridique comme celle de l’exemple que constitue la vie de Mahomet, « ce beau modèle envoyé par Allah ». Considère-t-il que le seul vrai et bon Mahomet est celui de la première période Mecquoise, celui d’avant l’émigration à travers le désert, une traversée qui l’aurait rendu fou et donc sourd par la suite au véritable message d’Allah ? De la même façon, que fait-il de l’intégralité du Coran, du principe d’abrogation des sourates antérieures et justement primitives, celles sur lesquelles il semble fonder sa vision ?
Des questions importantes s’il ne veut pas voir sa proposition de reforme balayée par une violente et puissante contre-réforme…
SILidin le Magnifique
« Le Coran dit – vous êtes libres dans votre religion » – religieux musulman, publié le 09 Mars 2010 dans Russia Today
Traduction par Sil pour eXc (traduction –à la truelle- comme j’ai pu tant la pensée de notre bon docteur est parfois un peu tortueuse) .
« Seul le multiculturalisme peut offrir une atmosphère pacifique à l’humanité, et la première société islamique fondée par le prophète Muhammad a été multiculturelle », rappelle le Dr Mohammed Tahir ul Qadri dans un entretien accordé à Russia Today. Revenant sur sa fatwa (décret religieux) publiée récemment et condamnant le terrorisme ainsi que les attentats-suicide, le Dr Tahir ul-Qadri a également déclaré que «la guerre sainte» est une traduction incorrecte du terme djihad et que le Coran parle bien de « liberté de religion ».
RT : Ici, au Royaume-Uni, nous connaissons surtout le terme de fatwa à travers celle qui a été émise contre Salman Rushdie et son livre « Les Versets sataniques ». Pourriez-vous nous expliquer ce qu’est une fatwa ?
TQ : Fatwa signifie littéralement un décret ou une décision, ce qui a une place très importante dans les sources juridiques, les lois et les jugements islamiques.
RT : Pourquoi avoir émis cette fatwa maintenant et non pas après les attentats du 11 septembre par l’exemple ?
TQ : D’ordinaire je n’établis jamais de fatwa. Mais je pense qu’il était temps parce que le terrorisme se repend telle une lame de fond. Il est devenu beaucoup plus fort qu’avant au Pakistan et dans cette partie du monde. L’an dernier, les terroristes ont commencé à tuer le peuple même, déterrant leurs corps pour les accrocher aux arbres, ils ont commencé à commettre des attentats un peu partout, à contrôler des portions entières de territoires, ce qui a poussé le gouvernement pakistanais à mener des opérations militaires contre eux. C’était l’année dernière. Et à cette époque, j’ai constaté que beaucoup de scientifiques, de nombreux prédicateurs, et même des dirigeants politiques, gardaient le silence sur ces actes de brutalité commis par les terroristes.
RT : Peut-on revenir sur les détails ? Que voulez-vous dire dans cette fatwa ? Pourquoi n’y est-il pas fait mention du Djihad ? Pourquoi avez-vous éludé cette question ?
TQ : Parce que je me suis concentré uniquement sur la question du terrorisme. Cependant je mentionne très clairement dans mon livre qu’un acte de terrorisme n’est pas le djihad.
RT : Donc en fait, le terrorisme ne peut être considéré comme une partie de la guerre sainte ?
TQ : Absolument pas. « Guerre sainte » est une traduction erronée, d’ailleurs je voudrais être clair et vous serez le moyen de communiquer ce message le plus rapidement possible au monde entier. La signification du terme « djihad » est « la lutte ». Le mot «guerre» n’est pas inclus dans l’origine et la signification du mot djihad. Le djihad est un concept beaucoup plus large qui signifie « s’efforcer de », « lutter ». Si vous mettez votre énergie, vos capacités et vos efforts au service de vos bonnes fins, alors cela est le djihad. Il n’y a donc pas de place pour l’agression dans le concept de djihad, pas de place pour la brutalité quand on parle de djihad. La guerre sainte n’est pas le concept exact, seul est celui de lutte sainte.
RT : Alors les terroristes détournent le concept de djihad ?
TQ : Oui. Ils égarent des gens, des jeunes, et leurs efforts n’ont pas de lien avec le djihad.
RT : Vous avez utilisé des termes comme «terrorisme» et «innocents» dans votre fatwa, or ce sont des termes susceptibles d’interprétation. Qu’entendez-vous par ces termes ?
TQ : Je comprends que le mot « innocent » puisse être utilisé par les terroristes. Je tiens à le clarifier : en cas de meurtre, le mot innocent n’est pas utilisé dans le Coran. L’assassinat, exception faite des « innocents », n’a jamais été accordé par le Coran. Ce que dit le Coran est que si quelqu’un tue un être humain sans le droit légitime accordé par un tribunal, si cette personne est un assassin intentionnel, alors il est passible de la peine capitale, de même s’il agit en rebelle en tuant quelqu’un, il est passible de la peine capitale, tout comme s’il est un terroriste et qu’il tue une personne, il est passible de la peine de mort. Donc, le Coran dit que si une personne n’est ni un assassin intentionnel, ni un terroriste, ni un tueur ou un rebelle … et que quelqu’un tue une personne qui ne rentre pas dans ces trois catégories, cet individu tue des personnes innocentes. Toute population pacifique, tous les hommes qui ne se battent pas avec vous sur le champ de bataille – tout le monde a le droit de tuer n’importe qui sur le champ de bataille – tout civil qui est non-combattant est une personne innocente.
RT : Le but de votre fatwa semble aller contre tout ce que les kamikazes et les fondamentalistes croient au sujet d’eux-mêmes. Qui espérez vous atteindre et quel effet pensez-vous qu’elle aura ?
TQ : J’espère atteindre ces millions de jeunes qui ne sont pas des extrémistes, mais qui sont disponibles. Des individus sont toujours derrière ces jeunes, leur tendant des pièges et leur mettant des mauvaises idéologies dans leur esprit, les induisant en erreur, utilisant des significations erronées de cette terminologie religieuse. J’espère qu’ils auront ainsi les idées suffisamment claires pour ne jamais se faire ravir par les terroristes. Deuxièmement, cette fatwa s’adresse aux milliers de jeunes qui n’ont pas encore le cerveau totalement délavé et qui ne sont pas devenus des kamikazes mais qui seraient sur cette voie. Ceux qui sont devenus conservateurs, qui vivent une vie isolée, qui croient à l’isolement et ne veulent pas être intégrés, ce qui pourrait les conduire au radicalisme et au terrorisme. Par cette fatwa ces milliers de jeunes vont arrêter cette fuite en avant, et j’espère que personne dans le monde musulman n’empêchera cet indispensable coup d’arrêt, si important pour l’Islam et l’humanité.
RT : Parlons de ce qui est de plus en plus connu comme l’islamophobie, notamment en Europe. Le politicien néerlandais Geert Wilders a fait un film qui dit que Coran est un livre fasciste – Qu’aimeriez-vous lui dire?
TQ : Je pense que ce sont là des activités comparables à celles de ceux (les partisans de Ben Laden et des Talibans) qui agissent contre les non-musulmans. Si dans le monde occidental certaines personnes commencent à faire le même genre de chose, ils ne contribueront pas au développement du processus de paix. Cela ne fera que créer de la haine. La question est que veulent-ils réaliser par là ? Juste de la haine ? Juste une réaction ? D’autres litiges ? Des affrontements et autres divisions de l’humanité ?
RT : Les oppositions à l’islam se multiplient en Europe en ce moment. La Suisse, par exemple, a interdit la construction de nouveaux minarets. La France parle d’interdire la burqa … pensez-vous que l’Europe est prête à accepter l’islam ?
TQ : La meilleure façon d’assurer une atmosphère pacifique pour l’humanité est le multiculturalisme. Il devrait y avoir la démocratie, la liberté de religions, de cultures, sans liberté pour le terrorisme, l’extrémisme, ou tout ce qui crée des brutalités et des divisions dans nos sociétés. La première société islamique créée par le prophète Muhammad, prophète de l’islam, à Médine, était une société multiculturelle. Il fonda cette société sur une alliance avec les Juifs, les chrétiens et leurs tribus alliées. Et leurs coutumes locales, cultures, traditions, religions et lois coutumières reçurent une garantie de protection. Le Coran dit « il devrait y avoir de liberté de religion ». Le Coran dit « vous êtes libres dans votre religion et nous sommes libres dans notre religion ».
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